C’est au bord d’une des piscines de La Mamounia que le créateur Amine Bendriouich prépare la présentation de sa nouvelle collection. Soleil couchant et musique berbère accompagnent les invités, tandis que c’est la frénésie en backstage. Certains mannequins manquent à l’appel. « Ils ont tous fait la fête hier soir à Casablanca, et ils ont raté leur train… J’ai appelé quelques amis pour qu’ils prennent leur place« , lâche, détendu, Amine.
Un regain d’effervescence
L’équipe du magazine Grazia a ainsi pu rencontrer Francesca en smoking ultramoderne, copine et collaboratrice italienne d’Amine, mais également Yassine, photographe jeune et talentueux – récemment repéré par Hermès, qui a affiché quelques-unes de ses images de chevaux marocains dans ses vitrines parisiennes -, en survêt brodé de symboles berbères. Youssef, mécène et dandy en total look denim. Kamal, fondateur de Nomad, Le Jardin et Le Café des épices, les trois restos les plus in, et les plus insta-friendly, de la ville, en pantalon large rose et blazer en shantung. Sofia, un ex-mannequin en minirobe en popeline, avec sa fille de 3 ans au bras. Et, bien sûr, Amine, qui aime se qualifier de « berberlinois » : veste en soie bleu ciel, moustache rétro et lunettes de soleil XXL, devenu presque malgré lui la figure de proue d’une nouvelle génération d’artistes basés à Marrakech.
En 2016, Amine collabore avec l’artiste Hassan Hajjaj – souvent surnommé « le Warhol marocain » – pour une collection de bombers réversibles sérigraphiés, épuisés chez Colette en moins de vingt-quatre heures. Hassan partage son temps entre Marrakech et Londres, où il finit à peine une rétrospective à Somerset House. Mais aujourd’hui, en attendant son expo, lors de la foire 1 : 54 à La Mamounia, les 24 et 25 février prochains, il reçoit au riad El Fenn, la boutique ultrachic établie par Miss Branson, un must pour les fans d’artisanat marocain.
« Montrer un autre Maroc »
L’esthétique d’Hassan Hajjaj est reconnaissable entre mille : mêlant la tradition, la pop et le street art, il photographie souvent ses compatriotes habillés de couleurs vives, entourés de symboles détournés du capitalisme, bouteilles de Coca-Cola ou logos de luxe en version fake.
Son atelier situé au Comptoir des mines est une ancienne usine reconvertie en galerie et résidence d’artistes, meublée de canapés de fortune sur des boîtes en plastique et de tables et tabourets en métal peints de logos multicolores marocains et occidentaux.
« Cette dernière décennie, tout a chaviré, révèle Amine. Après trente ans de politiques d’arabisation, nous redécouvrons aussi notre héritage berbère, touareg, juif… Cela a influencé nos idées sur l’esthétique et la mode. Tout est devenu hétéroclite. Avant, nous nous contentions d’imiter l’Occident. Aujourd’hui, notre culture est devenue cool à nos yeux… Finalement ! »
« Une ville cosmopolite »
Mais si la scène arty à Marrakech est palpitante, ce n’est pas pour une unique raison. Il y a quelque chose de profondément authentique dans cette union créative. Non seulement les artistes travaillent ensemble mais ils vivent aussi sous le même toit.
Mais pourquoi ont-ils choisi Marrakech comme centre névralgique plutôt que Casablanca, une ville quatre fois plus grande ? « Casablanca est une ville industrielle. Ici, c’est la capitale de l’artisanat. Pour moi qui ne travaille qu’avec des artisans – pas pour des raisons « éthiques » mais parce que j’ai été élevé comme ça et que c’est tout simplement ma manière naturelle de procéder – cela avait tout son sens« , revendique Amine. Selon Amine, c’est ce melting-pot de cultures, de références et d’influences qui est à l’origine de son ADN.